Départ pour Nam Nga, où nous devons nous arrêter avec le bus. Pas plus d’indication, Noy notre hôte nous attendra là bas.
Nous partons donc avec une camionnette, où se tassent 15 personnes, entourées de nombreux sacs de riz.
La route est toute cabossée, le chauffeur roule vite, freine par à coup, évite les camions avec des gestes brusques. Les paysages gigantesques de jungle défilent, surplombant le Mékong. Il doit beaucoup pleuvoir dans la région car tout est verdoyant.
Le Laos est un pays peu peuplé, seulement 6 OOO OOO d’habitants. Les villages que nous traversons sont juste formés d’une route principale avec une dizaine de maisons de chaque côté.
Le trajet est superbe, nous sommes secoués, nos fesses souffrent mais le paysage nous repose.
Arrivés à Nam Ga, nous nous posons au bord de l’asphalte, attendant Noy. Nous sommes au milieu de nulle part, les enfants qui sortent de l’école nous regardent en rigolant. Quelques Sabaidis (bonjour en Lao) nous sont adressés, une femme s’arrête pour nous saluer avec son bébé.
Noy arrive ensuite avec un homme du village. Son sourire en dit long sur sa gentillesse.
Elle est la femme Laotienne de Joel, le propriétaire des bungalows. C’est également la maman de Maly sa petite fille adoptée de 2 ans. Joël son mari français est malheureusement décédé il y a un mois d’une crise cardiaque. Noy essaie de reprendre avec courage la suite, alors qu’elle ne parle que quelques mots de français.
Quelques kilomètres sur un chemin de terre très remuant et nous faisons stop aux bungalows. Situés au milieu de nulle part, il n’y a que nous, et la nature.
La maison de Noy est très modeste une chambre et un salon ouvert sur l’extérieur. Nous dormirons là pour 4 jours.
Ce que nous constatons tout de suite c’est que la civilisation est loin derrière nous. Nous n’avons pas anticipé, un peu naïvement, mais ici on ne trouve pas l’essentiel. Notre essentiel, c’est à dire de l’eau en bouteille, de la crème solaire et des gâteaux et gourmandises pour les enfants. Il va falloir se rationner, et trouver un plan B. Pour la crème solaire, nous allons nous couvrir avec de longs vêtements, pas le choix, même s'il fait très chaud. Pour les gâteaux, les enfants vont manger ce que l’on trouve, ce sera régime bananes et mangues. Enfin, pour l’eau nous allons utiliser notre gourde Katadine qui filtre l’eau souillée. On vous dira si cela fonctionne aussi bien que mentionné sur la publicité.
Nous décidons également de prendre le traitement anti paludisme, car avec l’isolement nous préférons réduire tous les risques.
Un peu effrayant sur le coup, j’avoue, mais au final tellement excitant.
Noy nous accueille donc comme des membres de sa famille. On se retrouve ensemble à échanger quelques mots sur son canapé avec un verre d’eau fraîche.
Elle nous prépare ensuite un délicieux repas, je lui propose mon aide, je rêve de l’aider à cuisiner et comprendre les secrets de leurs mets si délicieux. Elle refuse par politesse, voulant me laisser à ma place d’invitée. Pour ce repas nous retrouvons les bases de la cuisine asiatique, du poulet avec de nombreux légumes croquants, du riz très collant et une omelette aux oignons. C’est divin !!
Durant le séjour Noy nous fera déguster des mets typiques du coin, bambous, souris, crocodiles des montagnes, algues… incroyablement bon grâce aux multiples aromates utilisés par elle.
Après le déjeuner, nous allons nous coucher pour une sieste réparatrice. La chaleur mange notre énergie, le ronron des ventilateurs finit de nous endormir.
Lorsque nous nous réveillons, quelle surprise, un groupe d’enfants est attablé dans le salon de Noy. Il y a Dorfaille ( 11 ans), Wanasin ( 10 ans), Tamoun ( 10 ans), Juli (12 ans) et mounmi (9 ans). Ils ont découvert le sac de jeux des enfants, véritable mallette à trésors et sont installés à colorier et coller des gommettes avec Côme qui n’a pas trouvé le sommeil.
Noy nous propose de poursuivre l’après-midi dans son village natal à quelques minutes à pied de la maison.
Quelle immersion les maisons sont en tôles, ou en bambou, certaines en parpaings sont plus imposantes. Les familles nous accueillent avec un grand sourire, les enfants se ruent vers nous pour nous parler, nous toucher. Un combat de coqs s’organise, les femmes tissent des foulards. Les enfants jouent avec des cailloux et des bâtons, leurs visages sont bruns par la poussière qui se soulève sous leurs déplacements. Nous trouvons une rivière en contrebas, où nous ne résistons pas de nous baigner avec les vêtements que nous portons. Une vingtaine d’enfants intrigués par notre présence se dépêchent et nous rejoignent. Les enfants sont très habiles, nagent, courent sur des galets glissants, grimpent à un arbre et se jettent dans le fleuve. Côme et Juliette sont encerclés car tous veulent les toucher et jouer avec eux.
Côme est heureux, la barrière de la langue n’entrave pas cet intense moment. Juliette est plus inquiète, les mouvements autour l'insécurisent, le chien qui se baigne avec elle lui griffe le dos ce qui ne l’amuse pas du tout. Elle va avoir besoin de plus de temps pour s’acclimater.
Le deuxième jour Noy, nous emmène sur son bateau avec deux hommes du village pour découvrir les populations voisines.
Une journée magique nous attend à la découverte des tribus Mong et Lalu, perdues au milieu de la jungle Laotienne.
Ce que nous découvrons c'est un peuple extrêmement pauvre. Les maisons faites de bambous abritent les habitants qui dorment à même la terre. Noy nous explique que c’est très difficile sur le plan sanitaire car l’eau rentre dans les maisons, et les cochons viennent y déposer leurs excréments.
Un habitant ajoute qu'il n’y a pas de médecine, alors lorsqu’un enfant où un adulte se blessent les habitants font une offrande à leur dieu en tuant un animal et espèrent que cela apportera la guérison. Un bébé de 8 mois avait fait une chute des bras de sa mère lors de notre passage, une plaie importante sur sa tête n'était pas soignée.
Les Lalus ont tout juste l’électricité, qu’ils génèrent eux même à partir de barrage hydroélectriques de fortune à base de dynamos et d’hélices de bateau. Ils ne peuvent pas s’équiper de frigo car cela consomme trop d’énergie. Frigo qui demeure toutefois pas très utile, car les habitants ne mangent de la viande qu’une à deux fois par an, lors de cérémonie.
La télévision elle, qui consomme moins d’énergie, est présente épisodiquement.
Les enfants sont vêtus de vêtements déchirés et tachés par la terre qui les environne. Ils jouent avec ce que la nature leur offre.
Petite Juliette distribuera des bonbons pour leur plus grand plaisir. Je suis fière d’elle car spontanément elle n’en gardera même pas un pour elle. Elle prendra autant de plaisir à les distribuer qu’à les déguster.
L’accueil que nous ont réservé les habitants était timide mais souriant. Les femmes nous présentent leurs bébés, tous plus beaux les uns que les autres.
Noy nous a préparé un bon repas que nous dégustons sous forme de pic nique au milieu du village. Quelques personnes viennent s’attabler avec nous, et tentent de discuter.
Une femme vient nous présenter ses créations en coton (jupes, chemises). Elle nous montre comment elle transforme le coton en fil, grâce à un rouet pour ensuite réaliser des étoffes. Nous avons ainsi pu mesurer l’étendue de la tâche. Avec le coton filé elle découpe des bracelets et nous les offre, en récitant une prière à chacun. Un moment chargé en émotion.
Ce que je retiens de cette journée c’est cette vie en communauté. Ce peuple ne connaît pas la solitude, les enfants jouent avec les autres enfants du village. Les personnes âgées habitent avec leurs enfants et petits enfants qu’elles portent en écharpes pendant la journée, lorsque les parents sont à travailler dans la montagne. Les handicapés sont protégés par la tribu et continuent de vivre dans le village.
Un jeune qui parlait deux mots d’anglais, nous a raconté qu’il était parti 5 ans à Luang Prabang dans une grande ville et qu’il était revenu dans son village natal car sa famille et ses amis lui manquaient.
Il est sans doute impossible de s’acclimater dans un autre contexte, ce que je conçois tout à fait, car nous même en 48 heures on se sent déjà si apaisés et si entourés.
Les deux derniers jours nous les avons passé tranquillement avec les enfants du village. La chaleur est très humide. Nos mouvements sont ralentis.
Bonne raison pour se reposer et jouer avec tous les petits.
Nous nous rendons compte tout d’abord avec joie, puis avec un fond de tristesse à quel point une feuille et un crayon font leur bonheur. Les coloriages ramenés de France, que Côme et Juliette ont à peine regardé, sont un trésor pour les petits laotiens. Le mot se passe dans le village qu’il y a de quoi s’amuser chez Noy, ainsi des groupes d’enfants arrivent par dizaine pour jouer.
Avec Noy nous décidons de lister ensemble les besoins des enfants, pour de France préparer un colis pour eux.
Il faut donc des jeux simples : crayons, gommettes, cahiers d’écriture et de coloriages. Quelques jouets à partager type ballons, petites voitures, dînettes, et poupées. Ils doivent être solides, résistant à l’eau et aux conditions rudes.
Nous vous en reparlerons à notre retour mais chers amis et familles, si l’envie vous en dit, si vous pouviez déjà arrêter de jeter et préparer quelques affaires pour eux. Cela serait un super projet et nous nous chargerons de les envoyer.
Nous graverons à jamais le visage des enfants du village dans notre mémoire. Sans s'en apercevoir ils nous ont beaucoup appris, par leur gentillesse, leur joie de vivre, leur naturel, et leur prévenance. Ils n’avaient rien à nous offrir. Ils ont fait bien plus, en nous acceptant dans leur vie sans aucune retenue.
C’était un moment unique, nous partons bouleversés et si heureux d’avoir fait leur rencontre.